Régime de l’apport-cession : l’essentiel en 5 points
- Report d’imposition automatique
Lorsqu’un contribuable apporte des titres à une société soumise à l’IS qu’il contrôle, la plus-value d’apport n’est pas immédiatement imposée : son imposition est reportée jusqu’à la survenance de certains événements (cession, rachat, remboursement ou annulation des titres reçus, ou cession des titres apportés dans les 3 ans).
- Condition de contrôle
Le report s’applique uniquement si la société bénéficiaire de l’apport est contrôlée par l’apporteur au sens strict du texte (majorité des droits de vote, pouvoir de décision, etc.).
- Sort du report en cas de cession rapide
Si la société bénéficiaire cède les titres apportés dans les 3 ans, le report d’imposition n’est maintenu que si elle réinvestit au moins 60 % du produit de cession dans des actifs éligibles (activité opérationnelle, prise de contrôle, souscription au capital, fonds éligibles) dans un délai de 2 ans.
- Exclusions et incompatibilités
Le régime n’est pas cumulable avec l’exonération « PME » (art. 199 terdecies-0 A), ne s’applique pas aux moins-values, ni aux opérations de fusion/scission, ni aux sociétés d’investissement ou activités de gestion de patrimoine.
- Sanctions en cas de manquement
En cas de non-respect des conditions (notamment de réinvestissement), la plus-value devient immédiatement imposable, avec intérêts de retard calculés à compter de la date de l’apport.
En synthèse :
Le régime de l’apport-cession permet de différer l’imposition des plus-values d’apport de titres à une société contrôlée, sous réserve de respecter des conditions strictes de contrôle, de réinvestissement et de conservation. Il vise à favoriser la réallocation de capitaux vers l’économie productive, tout en encadrant strictement les opérations patrimoniales.
Régime de l'apport-cession (article 150-0 B ter du CGI)
Définition
L’article 150-0 B ter du Code général des impôts instaure un report d’imposition obligatoire des plus-values réalisées lors de l’apport de valeurs mobilières, droits sociaux ou titres assimilés à une société soumise à l’impôt sur les sociétés (IS) ou à un impôt équivalent, contrôlée par l’apporteur au sens du texte. Ce report s’applique de plein droit, sous réserve du respect des conditions prévues au III de l’article 150-0 B ter.
Concrètement, cela signifie qu'un contribuable qui apporte des valeurs mobilières ou des titres à une société et qui réalise une plus-value à cette occasion peut bénéficier d'un report d'imposition de cette plus-value.
La plus-value d’apport doit être déclarée dans la déclaration prévue à l’article 170 du CGI, via le formulaire n° 2074-I, et reportée sur la déclaration d’ensemble des revenus (2042 C, ligne 8UT).
Cependant, le report d’imposition prend fin notamment lors de la cession, du rachat, du remboursement ou de l’annulation des titres reçus en rémunération de l’apport, ou en cas de cession à titre onéreux, rachat, remboursement ou annulation des titres apportés par la société bénéficiaire dans un délai de trois ans à compter de l’apport.
Conditions de réinvestissement
Pour que le report d’imposition soit maintenu en cas de cession, par la société bénéficiaire de l’apport, des titres reçus dans un délai de trois ans à compter de l’apport, cette société doit s’engager à réinvestir au moins 60 % du produit de la cession dans un délai de deux ans dans des actifs éligibles.
Les actifs éligibles au réinvestissement sont les suivants :
- Le financement de moyens permanents d’exploitation affectés à l’activité commerciale, industrielle, artisanale, libérale, agricole ou financière de la société bénéficiaire de l’apport, à l’exclusion des activités de gestion de son propre patrimoine mobilier ou immobilier.
- L’acquisition d’une fraction du capital d’une ou plusieurs sociétés exerçant une activité éligible (mêmes exclusions), sous réserve que cet investissement confère le contrôle de ces sociétés à la société bénéficiaire de l’apport, au sens du 2° du III de l’article 150-0 B ter.
- La souscription en numéraire au capital initial ou à l’augmentation de capital d’une ou plusieurs sociétés éligibles, répondant aux conditions d’activité, de régime fiscal et de localisation prévues par le texte (France, UE ou EEE avec convention d’assistance administrative).
- La souscription de parts ou actions de fonds communs de placement à risques (FCPR), de fonds professionnels de capital investissement (FPCI), de sociétés de libre partenariat (SLP) ou de sociétés de capital-risque (SCR), ou d’organismes similaires établis dans l’UE ou l’EEE, sous réserve du respect des quotas d’investissement en titres éligibles et d’une conservation des parts pendant cinq ans.
À noter :
Les actifs acquis en remploi doivent être conservés au moins 12 mois (ou 5 ans pour les parts de fonds).
Le non-respect de l’une des conditions de réinvestissement ou de conservation entraîne l’expiration du report d’imposition au titre de l’année d’expiration du délai ou de la rupture de la condition.
Expiration du report d’imposition
Le report d’imposition prend fin dans les cas suivants :
- En cas de cession à titre onéreux, de rachat, de remboursement ou d'annulation des titres reçus en rémunération de l'apport.
- En cas de cession à titre onéreux, de rachat, de remboursement ou d'annulation des titres apportés, si cet événement intervient dans un délai de trois ans à compter de l'apport des titres.
Exception :
Le report d’imposition n’est pas levé lorsque la société bénéficiaire de l’apport cède les titres dans un délai de trois ans à compter de la date de l’apport et s’engage à réinvestir, dans un délai de deux ans, au moins 60 % du produit de cette cession dans des actifs éligibles, conformément aux conditions prévues par l’article 150-0 B ter du CGI.
- En cas de cession à titre onéreux, de rachat, de remboursement ou d'annulation des parts ou droits dans des sociétés ou groupements interposés.
- En cas de transfert du domicile fiscal hors de France.
À noter :
En cas de transmission à titre gratuit (donation) des titres reçus en rémunération de l’apport, le report d’imposition est transféré au donataire si celui-ci contrôle la société bénéficiaire de l’apport à l’issue de la transmission. La plus-value en report devient alors imposable au nom du donataire en cas de cession, d’apport, de remboursement ou d’annulation des titres dans un délai de cinq ans (ou dix ans en cas de réinvestissement dans des fonds éligibles).
Exclusions et incompatibilités
1. Non-cumulabilité avec d’autres dispositifs
Le report d’imposition prévu à l’article 150-0 B ter du CGI n’est pas cumulable avec :
- L’exonération des plus-values prévue à l’article 199 terdecies-0 A du CGI (exonération PME) ;
- Les anciens régimes de report ou d’exonération (ex : article 150-0 C du CGI dans sa rédaction antérieure).
2. Exclusion des opérations de fusion ou de scission
Les opérations de fusion ou de scission entre sociétés ne relèvent pas du régime de report d’imposition de l’article 150-0 B ter, mais du sursis d’imposition de l’article 150-0 B du CGI.
3. Exclusion des moins-values
Le report d’imposition ne s’applique qu’aux plus-values d’apport. Les moins-values réalisées lors de l’apport restent soumises au régime de droit commun de l’article 150-0 B du CGI.
4. Exclusion des activités de gestion de patrimoine
Les activités de gestion de son propre patrimoine mobilier ou immobilier sont exclues du champ des réinvestissements éligibles pour le maintien du report d’imposition.
5. Exclusion des sociétés d’investissement
Les sociétés d’investissement, telles que les sociétés holding de gestion de portefeuille, SICAV, SPPICAV, SCR, et entités de même nature, sont exclues du champ des réinvestissements éligibles pour le maintien du report d’imposition.
6. Exclusion des opérations ne remplissant pas la condition de contrôle
Le report d’imposition n’est pas applicable si la société bénéficiaire de l’apport n’est pas contrôlée par l’apporteur au sens du 2° du III de l’article 150-0 B ter du CGI.
Tableau récapitulatif des principales exclusions
Exclusion | Référence principale |
Non-cumul avec l’exonération PME (art. 199 terdecies-0 A) | CGI art. 150-0 B ter, art. 150-0 C, art. 199 terdecies-0 A |
Opérations de fusion/scission | BOI-RPPM-PVBMI-30-10-60-10, CGI art. 150-0 B |
Moins-values d’apport | BOI-RPPM-PVBMI-30-10-60-10, CGI art. 150-0 B |
Gestion de patrimoine mobilier/immobilier | CGI art. 150-0 B ter, I-2°-a, BOI-RPPM-PVBMI-30-10-60-20 |
Sociétés d’investissement | BOI-RPPM-PVBMI-30-10-60-20, § 150 |
Absence de contrôle de la société bénéficiaire | CGI art. 150-0 B ter, III-2° |
Pénalités en cas de non-respect des conditions
En cas de non-respect de l’une des conditions du régime de report d’imposition prévu à l’article 150-0 B ter du CGI (notamment absence ou insuffisance de réinvestissement, non-respect des délais ou des conditions de conservation des actifs acquis en remploi), l’exigibilité de l’impôt sur la plus-value est immédiate.
L’impôt dû est assorti de l’intérêt de retard prévu à l’article 1727 du CGI, calculé à compter de la date de l’apport des titres (date à laquelle l’impôt aurait dû être acquitté en l’absence de report) et jusqu’au dernier jour du mois du paiement.
Le taux de l’intérêt de retard est de 0,20 % par mois, soit 2,4 % par an.
À noter :
Aucune majoration spécifique n’est prévue par l’article 150-0 B ter du CGI. Toutefois, en cas de mauvaise foi ou de manquement délibéré, les pénalités de droit commun peuvent s’appliquer.