La SCI VHI, ayant sous-concédé des droits de reproduction d’œuvres d’art, a été assujettie à l’IS par l’administration fiscale, qui a requalifié son activité en activité commerciale. Le Conseil d’État juge que la SCI n’a pas exercé d’activité d’agent d’affaires ni de location de meubles, et que la base légale de l’article 35 du CGI ne s’applique pas. Il annule les décisions antérieures et prononce la décharge de l’IS et des pénalités pour 2006, condamnant l’État à verser 6 000 euros à la SCI VHI.
Litige
La SCI Vae Homini Injusto (VHI), propriétaire d’un domaine transformé en « corpus d’œuvres d’art » (la « Demeure du Chaos »), a conclu plusieurs contrats relatifs à la gestion et à la reproduction des œuvres avec des sociétés du groupe Serveur. À la suite d’une vérification de comptabilité portant sur les années 2005 à 2007, l’administration fiscale a requalifié l’activité de la SCI en activité commerciale, soumise à l’impôt sur les sociétés (IS) pour l’exercice clos en 2006, assorti de pénalités. La SCI a demandé la décharge de ces impositions devant le tribunal administratif de Lyon, qui a rejeté sa demande. Après divers recours, le Conseil d’État, saisi d’un second pourvoi, statue définitivement.
Question
Les opérations de sous-concession de droits de reproduction d’œuvres d’art par la SCI VHI constituent-elles une activité commerciale, justifiant l’assujettissement à l’impôt sur les sociétés ? L’administration fiscale peut-elle fonder l’imposition sur une autre base légale (article 35 du CGI) en cours de procédure ?
Position du juge
Sur la qualification d’activité commerciale (article 34 CGI et article L. 110-1 du code de commerce) : Le Conseil d’État rappelle que les sociétés civiles sont soumises à l’IS si elles exercent une activité commerciale, notamment des actes réputés de commerce par la loi (article 34 CGI, article L. 110-1 du code de commerce). La cour administrative d’appel avait considéré que la sous-concession du droit de reproduction constituait une activité d’agent d’affaires (gestion du patrimoine d’autrui, 6° de l’article L. 110-1). Or, le Conseil d’État relève que la SCI n’a accompli aucun acte pour le compte des artistes ou de tiers, mais a seulement sous-concédé un droit dont elle était titulaire. Il s’agit donc d’une gestion de son propre patrimoine, non d’une activité d’agent d’affaires.
Sur la qualification d’activité de location de meubles (4° de l’article L. 110-1) : Le Conseil d’État constate que la sous-concession du droit de reproduction n’a pas donné lieu à une rémunération liée à l’exploitation du droit, ni à la mise en œuvre de moyens matériels ou humains par la SCI. La somme versée à la société L’Organe n’avait pas de contrepartie réelle. Il n’y a donc pas d’activité de location de meubles au sens du code de commerce.
Sur la substitution de base légale (article 35 CGI) : L’administration fiscale a tenté de fonder l’imposition sur l’article 35, 5° du CGI (location d’établissement commercial ou industriel meublé). Le Conseil d’État rejette cette substitution, car les bénéfices de la SCI proviennent de la sous-concession d’un droit de reproduction, non de la location d’un établissement meublé.
Solution
Le Conseil d’État annule l’arrêt de la cour administrative d’appel de Lyon du 6 avril 2023 et le jugement du tribunal administratif de Lyon du 5 février 2019, en ce qu’ils maintenaient l’imposition à l’IS et les pénalités pour l’exercice clos en 2006. Il prononce la décharge de la SCI VHI de ces impositions et condamne l’État à lui verser 6 000 euros au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.